Le GREP Midi Pyrénées réagit au rapport provisoire IPSP

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Contribution  de la commission prospective du GREP MP au manifeste pour le progrès social

Dès le lancement du projet de travail sur « le manifeste pour le progrès social », le GREP Midi Pyrénées avait  remarqué cette initiative originale, une sorte de première dans son genre : près de 300 chercheurs du monde entier en sciences sociales qui prennent l’initiative, sans aucun financement privé, de produire un rapport sur les orientations que devraient prendre les politiques publiques et sociales dans une perspective de justice et de  réel progrès social, mieux partagé et plus explicitement orienté vers l’amélioration de la condition humaine ; voilà qui nous a paru d’emblée mériter respect et attention.

Et en effet l’ambition des chercheurs s’est avérée remarquable : ils se sont réunis mi-2015 au sein de l’IPSP (International Panel on Social Progress, parrainé par Amartya Sen), ont défini un programme de travail impressionnant, et proposent de fournir des conseils en matière de progression sociale concrète à l’ensemble des autorités publiques et institutions du monde entier. C’est pourquoi la Commission Prospective du GREP MP a mis en place, tout au long de l’année 2016, une cellule de veille et de suivi de ces travaux. Les chercheurs de l’IPSP se sont répartis la tâche en 22 groupes de travail qui, en septembre 2016, ont émis un rapport et une synthèse de leurs réflexions, accessibles en ligne sur Internet. Ces 22 regards croisés sur la question du progrès social sont organisés en 3 sections dont les intitulés expriment bien le périmètre des questions étudiées : transformation socio-économiques ; régulation politique, gouvernance et transformations sociétales ; transformation des valeurs, normes et cultures.

Ces 22 chantiers mettent en exergue nombre d’anomalies dans les situations sociales sur la planète. Nous sommes dans un monde sous tension sociale, et très désynchronisé : de prodigieux progrès côtoient d’alarmantes régressions. Manifestement le progrès technologique et économique global, incontestable au niveau mondial, ne se traduit par aucun progrès social réel pour certains pans de l’humanité. Il y a plutôt intensification des crises économiques et politiques et, sur le plan social, une très grande partie de l’humanité n’a aucune autre perspective que celle d’essayer d’assurer sa survie à très court terme. D’où l’anxiété montante dans certaines contrées du monde, des écarts Nord/Sud qui se creusent et parfois à l’intérieur même de certains pays, le constat d’une minorité qui tire un réel bénéfice de l’économie néolibérale mondialisée, et d’une majorité qui se paupérise, se « bidonvillise » avec ressentiment, ou se retrouve  socialement invisible.

Les travaux de l’IPSP représentent un diagnostic complet et approfondi. Les analyses sont souvent pertinentes, parfois originales. Nous attirons l’attention sur l’intérêt du chapitre 6 dont le regard critique est très éclairant et pose de profondes questions à propos de la pertinence du modèle de développement occidental, modèle à présent dominant sur toute la planète. Il pointe le problème crucial que représente la conjonction entre le pouvoir d’agir des entreprises transnationales, qui est croissant, et leur déresponsabilisation, elle aussi croissante. Il interroge la capacité de la planète à survivre aux blessures écologiques et anthropologiques infligées par ce modèle néolibéral à la biosphère. Au total les apports de la démarche IPSP sont évidents :

  • Ils représentent la synthèse à la fois structurée et opérationnelle d’un savoir devenu si complexe, protéiforme et diversifié qu’il est totalement inaccessible à un individu seul, à une discipline seule, peut-être même à une nation seule ;
  • Ils représentent la tentative à ce jour la plus avancée de contribution des sciences humaines et sociales à la promotion concrète d’un progrès social ambitieux, mettant réellement la question humaine au centre de la réflexion ;
  • Ils représentent un diagnostic solide des situations et urgences sociales mondiales, et seront à disposition de toutes les institutions, nations ou individualités, dans le monde entier, qui souhaiteront s’atteler à la mise en œuvre de politiques d’amélioration de la condition humaine.

C’est pourquoi le GREP MP attire l’attention de tous sur l’intérêt du travail de l’IPSP. Pour autant, nous proposerons de poursuivre la réflexion sur « le progrès social » d’une façon plus délibérément orientée vers la recherche d’alternatives, alternatives qui ne manquent pas, mais restent inaudibles. (Cf. le film « Demain », 2015). Car les travaux de l’IPSP, se voulant larges et complets, restent relativement « encyclopédiques », et sont à ce stade trop peu orientés vers la promotion de véritables changements. Nous aurions apprécié dans cet esprit que l’IPSP :

  • propose une réactualisation de la déclaration de Philadelphie de 1944. Cette déclaration dont l’intérêt a été maintes fois rappelé dans plusieurs chapitres, n’a pas fait l’objet d’une tentative de reprise en main. Elle représentait pourtant une belle opportunité de réactualiser une revendication sociale globale, de portée planétaire, tout à fait adaptée au traitement des anomalies si scrupuleusement répertoriées dans les chapitres préliminaires ;
  • porte une attention plus grande aux évolutions technologiques et à leurs effets indirects sur le progrès social : ces évolutions sont distribuées à l’humanité selon des critères de solvabilité plutôt que de nécessité, ce qui accentue la désynchronisation entre certains groupes sociaux ;
  • propose une analyse plus approfondie des motifs des dysfonctionnements sociaux repérés : plusieurs chantiers semblent s’être contentés de raisonner en termes d’adaptation aux logiques libérales. Ils n’ont pas vigoureusement contesté le positionnement du fait humain comme variable d’ajustement des logiques libérales. Ce faisant, ils sont parfois partis « battus d’avance » et ces analyses devront être réactivées.
  • Mettre davantage en exergue plusieurs notions certes évoquées dans certains chantiers, mais insuffisamment développées, comme les notions de communs, de dignité, de solidarité, qui nous semblent capables d’initier de nouveaux types de comportement dans le monde.

Voici donc les lignes de conduite que nous proposerons pour la poursuite de ces réflexions en région Occitanie. Il fallait certes commencer par élaborer un diagnostic planétaire au sujet du progrès social, et les travaux de l’IPSP y contribueront très certainement. Mais ils mettent aussi en évidence le besoin de proposer des axes de retournement de nos logiques néolibérales. Car c’est toute la pertinence du dispositif de la démocratie sociale à l’occidentale qui est questionnée par l’amoncellement des dysfonctionnements sociaux à la surface du globe. Le plus gros du travail reste à réaliser.

 

Le GREP MP (Groupe de Recherche pour l’Éducation et la Prospective), est une association culturelle, reconnue d’utilité publique depuis 1999. Il s’est donné pour mission de dynamiser le débat citoyen dans la métropole toulousaine, le département de la Haute-Garonne et la région Midi-Pyrénées.

 

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Déclaration concernant les buts et objectifs de l’Organisation Internationale du Travail (Déclaration de Philadelphie)

La Conférence générale de l’Organisation Internationale du Travail, réunie à Philadelphie en sa vingt-sixième session, adopte, ce dixième jour de mai 1944, la présente Déclaration des buts et objectifs de l’Organisation internationale du Travail, ainsi que des principes dont devrait s’inspirer la politique de ses Membres.

I

La Conférence affirme à nouveau les principes fondamentaux sur lesquels est fondée l’Organisation, à savoir notamment:

– (a) le travail n’est pas une marchandise;

– (b) la liberté d’expression et d’association est une condition indispensable d’un progrès soutenu;

– (c) la pauvreté, où qu’elle existe, constitue un danger pour la prospérité de tous;

– (d) la lutte contre le besoin doit être menée avec une inlassable énergie au sein de chaque nation et par un effort international continu et concerté dans lequel les représentants des travailleurs et des employeurs, coopérant sur un pied d’égalité avec ceux des gouvernements, participent à de libres discussions et à des décisions de caractère démocratique en vue de promouvoir le bien commun.

II

Convaincue que l’expérience a pleinement démontré le bien-fondé de la déclaration contenue dans la Constitution de l’Organisation internationale du Travail, et d’après laquelle une paix durable ne peut être établie que sur la base de la justice sociale, la Conférence affirme que:

– (a) tous les êtres humains, quels que soit leur race, leur croyance ou leur sexe, ont le droit de poursuivre leur progrès matériel et leur développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité économique et avec des chances égales;

– (b) la réalisation des conditions permettant d’aboutir à ce résultat doit constituer le but central de toute politique nationale et internationale;

– (c) tous les programmes d’action et mesures prises sur le plan national et international, notamment dans le domaine économique et financier, doivent être appréciés de ce point de vue et acceptés seulement dans la mesure où ils apparaissent de nature à favoriser, et non à entraver, l’accomplissement de cet objectif fondamental;

– (d) il incombe à l’Organisation Internationale du Travail d’examiner et de considérer à la lumière de cet objectif fondamental, dans le domaine international, tous les programmes d’action et mesures d’ordre économique et financier;

– (e) en s’acquittant des tâches qui lui sont confiées, l’Organisation internationale du Travail, après avoir tenu compte de tous les facteurs économiques et financiers pertinents, a qualité pour inclure dans ses décisions et recommandations toutes dispositions qu’elle juge appropriées.

III

La Conférence reconnaît l’obligation solennelle pour l’Organisation internationale du Travail de seconder la mise en œuvre, parmi les différentes nations du monde, de programmes propres à réaliser:

– (a) la plénitude de l’emploi et l’élévation des niveaux de vie;

– (b) l’emploi des travailleurs à des occupations où ils aient la satisfaction de donner toute la mesure de leur habileté et de leurs connaissances et de contribuer le mieux au bien-être commun;

– (c) pour atteindre ce but, la mise en œuvre, moyennant garanties adéquates pour tous les intéressés, de possibilités de formation et de moyens propres à faciliter les transferts de travailleurs, y compris les migrations de main-d’œuvre et de colons;

– (d) la possibilité pour tous d’une participation équitable aux fruits du progrès en matière de salaires et de gains, de durée du travail et autres conditions de travail, et un salaire minimum vital pour tous ceux qui ont un emploi et ont besoin d’une telle protection;

– (e) la reconnaissance effective du droit de négociation collective et la coopération des employeurs et de la main-d’œuvre pour l’amélioration continue de l’organisation de la production, ainsi que la collaboration des travailleurs et des employeurs à l’élaboration et à l’application de la politique sociale et économique;

– (f) l’extension des mesures de sécurité sociale en vue d’assurer un revenu de base à tous ceux qui ont besoin d’une telle protection ainsi que des soins médicaux complets;

– (g) une protection adéquate de la vie et de la santé des travailleurs dans toutes les occupations;

– (h) la protection de l’enfance et de la maternité;

– (i) un niveau adéquat d’alimentation, de logement et de moyens de récréation et de culture;

– (j) la garantie de chances égales dans le domaine éducatif et professionnel.

IV

Convaincue qu’une utilisation plus complète et plus large des ressources productives du monde, nécessaire à l’accomplissement des objectifs énumérés dans la présente Déclaration, peut être assurée par une action efficace sur le plan international et national, et notamment par des mesures tendant à promouvoir l’expansion de la production et de la consommation, à éviter des fluctuations économiques graves, à réaliser l’avancement économique et social des régions dont la mise en valeur est peu avancée, à assurer une plus grande stabilité des prix mondiaux des matières premières et denrées, et à promouvoir un commerce international de volume élevé et constant, la Conférence promet l’entière collaboration de l’Organisation internationale du Travail avec tous les organismes internationaux auxquels pourra être confiée une part de responsabilité dans cette grande tâche, ainsi que dans l’amélioration de la santé, de l’éducation et du bien-être de tous les peuples.

V

La Conférence affirme que les principes énoncés dans la présente Déclaration sont pleinement applicables à tous les peuples du monde, et que, si, dans les modalités de leur application, il doit être dûment tenu compte du degré de développement social et économique de chaque peuple, leur application progressive aux peuples qui sont encore dépendants aussi bien qu’à ceux qui ont atteint le stade où ils se gouvernent eux-mêmes, intéresse l’ensemble du monde civilisé.